Le drop est l’un des paramètres principaux des chaussures de course à pied. Dans cet article, nous vous expliquons ce que c’est exactement et proposons des pistes pour choisir la meilleure configuration pour vous.
Qu’est-ce que le drop ?
Le drop est un terme de course à pied récurrent que l’on entend souvent pour décrire une paire de chaussures de running.
Pour expliquer au mieux ce qu’est le drop d’une chaussure, il nous faut rappeler la composition d’une semelle de chaussure de running classique. Celle-ci se compose de deux éléments :
- La semelle extérieure qui, comme son nom l’indique, est en contact avec le sol. Celle-ci est généralement en caoutchouc et assure l’adhérence et la traction des chaussures.
- Ensuite, la semelle intermédiaire est située au dessus, juste sous le pied. Celle-ci procure l’amorti des chaussures. Souvent composée de mousse, elle essaie d’absorber les chocs et de soutenir le pied.
En additionnant l’épaisseur de ces deux éléments, on obtient l’épaisseur totale de la semelle. En anglais, le terme est « stack height ».
Pour faire simple, la définition du drop est la suivante : il s’agit de la différence de hauteur entre le talon et l’avant de la chaussure (sous les métatarsiens).
Le terme complet en anglais est Heel-to-Toe Drop (littéralement l’inclinaison entre le talon et l’orteil). Il désigne la différence d’épaisseur entre l’épaisseur totale de la semelle au niveau du talon et l’épaisseur totale de la semelle à l’avant du pied. Il est exprimé en millimètres.
Par exemple, si une chaussure a une épaisseur de 30 mm à l’ arrière et 24 mm à l’ avant, le drop est donc de 6 mm.
L’origine du drop
Christopher McDougall, l’auteur de Born to Run, attribue l’apparition du drop avec le modèle emblématique de Nike : la Cortez. Sortie en 1972 (il y a donc 50 ans), ce fut l’une des premières chaussures avec une différence significative de hauteur entre l’arrière et l’avant de la chaussure.
Selon McDougall, ce modèle a eu un impact majeur sur les chaussures modernes. Avant cela, les chaussures de running étaient beaucoup plus simples et principalement sans élévation. Le pied reposait donc à plat sur le sol au lieu d’avoir un profil élevé au niveau du talon.
Ces dernières année, la notion de drop d’une chaussure de running est devenue centrale et s’est imposée comme un critère majeur à l’ achat.
Quel est l’impact du drop sur le coureur ?
Toujours selon McDougall, qui retrace la genèse des chaussures de running dans son livre, le drop a beaucoup influencé la foulée des athlètes.
En effet, le fait d’avoir le pied incliné par rapport au sol change la biomécanique du runner : plus l’inclinaison d’une chaussure est élevée et plus le coureur aura tendance à amortir son pied sur le talon. À l’inverse, une inclinaison faible ou nulle favorisera une attaque médio ou avant-pied.
Ces dernières années, il y a un engouement pour les chaussures zero drop ou avec un un drop limité car celles-ci permettraient d’adopter une foulée naturelle en respectant l’anatomie du pied.
Par exemple, la marque Altra propose exclusivement des modèles de chaussures zero drop avec des semelles épaisses.
De la même manière, les chaussures Hoka One One ont toute une inclinaison faible (4-5 mm).
Cependant, comme nous allons le voir plus loin, la relation entre drop et blessure n’est pas évidente.
Quel est le meilleur drop ?
Le meilleur drop pour un athlète est celui qui lui permet :
- De ne pas se blesser
- De courir de la manière la plus efficace possible pour une performance optimale
Cela peut varier d’un coureur à l’autre. S’il y avait une configuration parfaite, toutes les marques l’adopteraient. Hors nous constatons que la plupart des marques proposent un éventail de chaussures avec des drops différents.
Les principales catégories sont les suivantes :
- Drop zero (0 mm)
- Drop faible (1-5 mm)
- Drop moyen (6-10 mm)
- Drop élevé (> 10 mm)
En 2021, les chaussures avec un drop moyen restent les plus populaires mais on constate que de nombreux nouveaux modèles sur le marché affichent des drops faibles.
Par exemple, c’est le cas de la célèbre Alphafly de Nike et son drop de 4 mm (ndlr : remonté à 8 mm pour la v3).
De son côté, le géant Japonais du running Asics avait jusqu’à maintenant tendance à privilégier un amorti élevé (12 mm) mais la marque a opté pour un drop réduit pour sa MetaSpeed Sky (5 mm).
Néanmoins, ses grands classiques comme les Kayano, Cumulus et Nimbus conservent des semelles plutôt inclinées (10 mm).
La sagesse populaire recommande de choisir son drop en fonction de son type de foulée : les coureurs qui attaquent du talon privilégieront un drop moyen ou élevé tandis que les coureurs avec une attaque du milieu ou de l’avant du pied opteront pour un drop zero ou faible.
Cependant, cette approche n’est pas évidente. En effet, la grande majorité des athlètes (au moins 75%) (1) ont une attaque talon.
Est-ce que cela veut dire pour autant que nous devons tous opter pour un drop moyen ou élevé ? Pas forcément.
Que dit la science ?
L’étude de référence à ce jour est celle réalisée en 2016 par Malisoux et al. (2). Les chercheurs ont étudié 553 coureurs lors d’un essai randomisé contrôlé où ceux-ci étaient divisés en 3 groupes en fonction de l’inclinaison de leurs chaussures :
- 10 mm
- 6 mm
- 0 mm
À noter que toutes les chaussures étaient des modèles standard avec un cushioning traditionnel. Il n’y avait donc pas de chaussures minimalistes (semelle très fine) ou maximalistes (semelle très épaisse).
Les résultats sont les suivants :
Malisoux et al. (2016)
De manière générale, il n’y a pas eu de différences en termes de blessures entre les différents groupes. Le drop n’a donc pas impacté le risque de blessure.
Les chaussures avec un drop faible (0-6 mm) augmentent le risque de blessure pour les coureurs réguliers (pratiquant depuis plus de 6 mois).
Les chaussures avec un drop faible (0-6 mm) diminuent le risque de blessure pour les coureurs occasionnels.
Néanmoins, une revue systématique des articles de recherche scientifique sur le sujet (2) notent qu’il n’y a pas assez d’études à l’heure actuelle pour tirer des conclusions probantes applicables au plus grand nombre.
En clair, retour à la case départ. Nous ne sommes donc pas plus avancés pour déterminer le drop optimal. Que faire à partir de ce constat ?
Nos conseils pour choisir le bon drop
1. Faites confiance à votre ressenti
Tout d’abord, si vous courez sans vous blesser avec votre drop actuel, alors il n’y a aucune raison d’en changer.
Si vous désirez opter pour un nouveau modèle, mieux vaut opter pour le même drop. De cette manière, si des douleurs apparaissent, vous saurez que cela ne vient probablement pas du drop mais d’un autre critère (e.g. épaisseur et densité de la semelle, maintien de la tige).
À l’inverse, si vous avez tendance à vous blesser régulièrement ou a ressentir de la douleur ou des gènes, dans ce cas, un changement de drop peut être bénéfique.
Cependant, attention à ne pas tout changer.
Essayez de garder les autres paramètres identiques à ceux de vos chaussures actuelles et de changer uniquement le drop pour voir si cela vous aide. C’est également une bonne idée de prendre des notes pour documenter votre parcours.
2. Variez le drop pour varier les plaisirs
Même si utiliser exclusivement le drop qui vous permet de courir confortablement est une bonne idée, il peut être intéressant d’expérimenter pour habituer son corps a d’autres configurations.
Par exemple, une étude (4) a montré qu’avoir une rotation de plusieurs chaussures pouvait diminuer le risque de blessure.
D’autre part, il peut être intéressant d’alterner entre route et trail pour voir si cela a un impact sur votre confort. Certains coureurs préfèrent un drop plus bas pour le trail par rapport à la route. Mais encore une fois, c’est une questions personnelle.
3. Évoluez en douceur
Si vous décidez de tester d’autres niveaux de drop, attention cependant à ne pas passer d’un extrême à l’autre.
Par exemple, si vous courez avec un drop de 8 mm, vous pouvez essayer une autre chaussure avec un drop de 6 mm plutôt que de tenter directement le zero drop.
4. Évitez les dogmes
À l’évidence, c’est un conseil qui ne s’applique pas exclusivement à la course à pied mais en l’absence de consensus scientifique clair, le running est un terreau fertile pour les recommandations en tout genre.
Hors ce qui fait des merveilles pour un coureur peut être néfaste pour un autre.
Comme nous l’avons vu, même si en théorie un drop faible semble favoriser une foulée plus naturelle, rien n’indique que cela puisse clairement réduire le risque de blessure.
Il faut donc y aller doucement et tirer ses propres conclusions en fonction de son expérience personnelle.
Conclusion
Nous avons donc vu que le drop était la différence de hauteur entre le talon et l’avant d’une chaussure de running.
Les drops faibles et moyens sont les plus populaires.
Cependant, aucune preuve scientifique n’atteste de la supériorité d’une configuration par rapport à l’autre pour réduire le risque de blessure lors de la course à pied.
Comme nous le répétons souvent, il est donc important de faire avant tout confiance à son expérience personnelle.
Le critère le plus important pour le choix ses chaussures running reste le confort.
Et vous, qu’en pensez-vous ? Quelle est l’inclinaison de vos chaussures running et quelle en est votre expérience ? Faites nous part de votre expérience dans les commentaires !
Liens intéressants
- Les meilleures chaussures drop 0 mm
- Chaussures de trail avec un drop de 4 mm
- Chaussures de trail avec un drop de 6 mm
Sources
(1) Is changing footstrike pattern beneficial to runners?
Joseph Hamill, Allison H.Gruber (2017). Journal of Sport and Health Science.
https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S2095254617300285#bib0105/
(2) Influence of the Heel-to-Toe Drop of Standard Cushioned Running Shoes on Injury Risk in Leisure-Time Runners A Randomized Controlled Trial With 6-Month Follow-up
Laurent Malisoux, PhD, Nicolas Chambon, PhD, Axel Urhausen, Prof., MD and Daniel Theisen, PhD (2016)
https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1177/0363546516654690
(3) Systematic Review of the Role of Footwear Constructions in Running Biomechanics: Implications for Running-Related Injury and Performance
Xiaole Sun et al. (2020). Journal of Sports Science and Medicine.
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC7039038/
(4) Can parallel use of different running shoes decrease running-related injury risk?
Malisoux et al. (2015). Scandinavian Journal of Medicine & Science in Sports.
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/24286345/
Nos autres articles pour vous aider à courir pour une santé optimale :
Bonjour, quel est le nom du modèle de la nike en photo. Est ce la flyknit racer?
Oui il me semble que c’est la Flyknit Racer Mariah.
Il semblerait que ne pas porter de chaussures réveille les mécanismes naturels d’auto-protection du corps par adoption de la posture et de la foulée la plus sure prévenant ainsi les blessures. Une chaussure, même en 0drop, peut « rassurer ». Dommage qu’il n’y ait pas de catégorie « 0 drop barefoot » dans cette étude.
1 an de douleurs au genoux, rien de visibles aux examens médicaux, et la douleur a totalement disparu avec des chaussures de 8mm de drop alors que les précédentes avaient un drop de 10mm… 8mm semble par conséquent plus adapté à ma morphologie mais ce n est sûrement pas une généralité…
J’avais des semelles faite par un podologue pour ménager mes tendons d’Achille, au final ça n’a pas réglé le problème et au niveau de la course à pied j’ai énormément perdu. La semelle perturbait totalement ma foulée. Depuis trois semaines je cours avec des Adidas adios 4 et quel bonheur. J’ai retrouvé ma foulée. Je pense donc qu’un drop trop important n’est pas bon.
A l’instar de l’entreprise MOSANTO et des herbicides, je reste septique sur l’étude menée par Malisoux et al.
Trop d’enjeux commerciales derrières ces résultats. J’aurais aimé que d’autres études européennes et indépendantes confirment ou infirment ses résultats.
Personnellement, j’utilise des Altra (0 drop) avec des semelles orthopédiques avec une rehausse de 6mm, donc un drop de 6 mm au total. Depuis, plus de douleurs et je retrouve une foulée plus naturelle. Moins d’impacts sur le talon mais d’avantage médio-pied.
Je ne suis pas persuadé d’un drop au delà de 6 mm soit bon.
Au vue des resultats de l’étude je me demande si le drop idéal pour chacun ne dependrait pas de l’etirement ou raccourcissement de la chaîne posterieure?
Ce qui expliquerait la différence apparemment significative entre coureur regulier et occasionnel, mais aussi la variabilité individuelle tout court.
Très intéressant je vais creuser cette piste
Comparaisons intéressantes.
À voir le nombre de marques de souliers avec un drop fort et semelles épaisses qui sont vendus dans les magasins, pas surprenant que les choix de souliers drop zéro, à semelles minces et minimalistic soient plus rares. Cela confirme que 75% des coureurs courent sur le talon, tel que vous le mentionnez dans votre article. Ainsi, la majorité des coureurs courent comme ils marchent ( en atterrissant sur le talon), alors que la façon naturelle de courir est en attaquant le sol sur la plante du pied et/ou les orteils comme le fond les sprinters. Mais la demarche de chacun est bien personnelle.
Dans mon cas, courir en atterrissant sur le talon et transférer l’impact du talon aux orteils (rouler) pour donner l’impulsion de la foulée suivante est une perte de temps. Par contre, atterrir sur les orteils garde le coureur moins longtemps en contact avec le sol car le talon ne touche pas au sol et le talon d’Achille agit comme un ressort qui pousse le piedpour la foulée suivante. Je fais du sprint et de la course et je cours de la même façon sur la route que sur la piste, seule la vitesse au km change selon la distance. Alors je cours avec des souliers zéro drop et semelles basses en tout tempsque ce soit dans des espadrilles de course ou des spikes et la distance ne me fait pas mal aux pieds.
Cycliste de base plutôt puissant, donc avec de gros mollets, j’aime courir et malheureusement je me blesse régulièrement aux mollets après plusieurs séances, notamment lorsque je cours à plus de 12 km/h. Supinateur, j’ai toujours couru en Asics Nimbus. Pesant 78 kg, est ce que passer sur des hoka one one bondi 8 ou des ON Cloudmonster hyper peux me permettre de régler mon problème ?
Bonjour, il est toujours bon d’expérimenter avec différents modèles, mais si vous avez des Nimbus et que vous n’aviez pas de souci avant, je ne pense pas que changer de modèle puisse résoudre votre problème. Je vous conseille de consulter un kiné spécialiste de la course à pied pour une analyse biomécanique et des recommandations en termes de technique, chaussures et renforcement musculaire. Sportivement, Kevin