
La nutrition est indispensable pour optimiser les performances des coureurs, notamment dans les épreuves d’endurance.
Ces dernières années, les « régimes sans sucre » ont suscité un vif intérêt. Ils promettent une meilleure santé générale, une perte de poids accélérée et une gestion plus efficace de l’énergie pendant l’effort.
Cependant, il est largement reconnu que les glucides jouent un rôle central dans l’alimentation des sportifs, en particulier pour les activités physiques d’intensité élevée ou prolongée.
Face à ces discours contradictoires, il n’est pas toujours évident de démêler le vrai du faux.
Nous vous proposons donc de découvrir les besoins des coureurs et de mieux comprendre les avantages et limites du régime cétogène (faible en glucides).
Ces éléments vous permettront de déterminer si ce type d’alimentation est adapté à vos objectifs et à votre pratique sportive.
Les besoins énergétiques du coureur

Lorsque vous pratiquez une activité physique d’endurance telle que la course à pied, vous avez besoin d’énergie. Celle-ci est principalement apportée par les glucides, qui sont la source d’énergie privilégiée pour les efforts intenses et prolongés.
Lorsque vous consommez des glucides, ceux-ci se décomposent en glucose et peuvent être utilisés directement comme carburant pour alimenter vos muscles et vos organes. S’ils ne sont pas sollicités, ils sont stockés sous forme de glycogène dans les muscles et le foie pour être utilisés plus tard.
Pendant les efforts intenses et courts comme les sprints, les muscles utilisent le glycogène pour créer de l’adénosine triphosphate (ATP), la molécule d’énergie de base. Ce processus permet de générer de l’énergie rapidement, mais il entraîne en contrepartie la production d’acide lactique, responsable de la sensation de brûlure et des courbatures.
Pendant les efforts plus longs à allure modérée, le corps mobilise le glycogène stocké grâce à la glycolyse, un processus efficace, mais un peu plus lent. Une fois que les réserves sont épuisées, l’organisme se tourne vers d’autres sources d’énergie : les graisses (via la lipolyse). Il s’agit d’un processus encore plus lent, mais essentiel pour soutenir les efforts de longue durée, et, en dernier recours, les protéines.
L’utilisation des protéines comme source d’énergie est toutefois peu souhaitable, car cela entraîne une dégradation des muscles, ce qui peut nuire à la fois aux performances et à la récupération.
Comprendre le régime sans sucre

Dans un régime sans sucre (ou régime cétogène), on élimine ou réduit drastiquement la consommation de glucides, notamment les glucides simples. On les retrouve dans les fruits, les pâtes, le riz, etc. Alors que dans une alimentation classique ils représentent 50 % à 60 % des apports journaliers, ils tombent à 5 % à 10 % de l’apport calorique quotidien dans un régime cétogène.
Cette réduction force le corps à puiser dans ses réserves de glycogène, puis à utiliser les graisses comme principale source d’énergie. Les lipides représentent donc 70 % à 80 % des apports caloriques du régime sans sucre. Le foie transforme ces graisses en corps cétoniques, qui servent de carburant alternatif pour le cerveau et les muscles.
Les protéines quant à elles fournissent 10 % à 20 % des apports caloriques. Leur consommation reste modérée. En effet, en cas d’excès, elles peuvent être converties en glucose via la néoglucogenèse, ce qui compromettrait l’entrée en cétose.
L’état de cétose se caractérise par une production accrue de corps cétoniques. Il permet à l’organisme et au cerveau de fonctionner grâce à ce carburant alternatif, remplaçant ainsi les glucides comme source principale d’énergie.

Les avantages du régime sans sucre chez le coureur
L’avantage majeur du régime sans sucre chez les coureurs réside dans l’adaptation métabolique qu’il favorise. En l’absence de glycogène facilement disponible, le corps apprend à utiliser les graisses comme principale source d’énergie grâce au processus de cétose. Cette adaptation est particulièrement bénéfique pour les efforts longs et peu intenses. En effet, les réserves de graisse peuvent alors répondre aux besoins énergétiques sans nécessiter une ingestion importante de glucides pendant l’activité.
D’après une étude réalisée par Jeff Volek et ses collègues (1), plus les athlètes sont habitués au régime cétogène (depuis un an et demi ou plus), plus leur organisme devient efficace dans l’utilisation des graisses comme carburant.
L’étude note aussi que les personnes qui suivent ce régime depuis longtemps peuvent mobiliser les lipides sur des activités à intensité relativement élevée, jusqu’à 65 % de VO2 max.

En dehors de la course à pied, le régime cétogène permettrait d’améliorer la sensibilité à l’insuline, limitant ainsi le risque d’apparition de diabète de type 2 par exemple.
De plus, les sucres raffinés sont connus pour leurs propriétés inflammatoires. Les réduire dans l’alimentation peut donc contribuer à une diminution des douleurs articulaires.
Enfin, dans une certaine mesure, le régime cétogène peut favoriser une perte de poids, ce qui peut être bénéfique pour certains sportifs dans une optique de performance ou de bien-être.
Les limites du régime sans sucre
Le régime cétogène peut être difficile à tenir sérieusement. Le moindre écart alimentaire, tel qu’une consommation excessive de glucides, interrompt la production de corps cétoniques et sort l’organisme de l’état de cétose.
Pour en ressentir les bénéfices, il est donc nécessaire d’être très rigoureux dans son alimentation et de bien mesurer son ratio glucides/lipides/protéines. Cela peut être chronophage et même engendrer de l’orthorexie, un trouble de l’alimentation qui provoque un contrôle permanent et excessif de la nourriture.
De plus, le risque de carences alimentaires est élevé sur un tel régime. Par exemple, la consommation de fruits est très limitée, ce qui peut entraîner un manque de micronutriments comme les vitamines et les minéraux.
Pour éviter ces déséquilibres, un suivi médical rigoureux et des analyses régulières sont fortement recommandés.

Si vous pratiquez habituellement des efforts à haute intensité tels que les fractionnés à 80 % de VMA ou plus, vos performances pourraient pâtir de ce régime. Ces efforts nécessitent une source d’énergie rapide, fournie principalement par les glucides, que le régime cétogène limite drastiquement.
Enfin, différentes études telles que celle de Matthew Erlenbusch et al. (2) démontrent que l’adoption d’un régime riche en glucides améliore davantage l’endurance qu’un régime cétogène.
L’étude de Skovbro et al. (3) souligne aussi que la restriction des glucides limite l’augmentation des mitochondries induite par l’entraînement. Ces dernières sont pourtant essentielles à la production d’énergie, ce qui pourrait freiner les gains de performance en endurance.
Trouver le bon équilibre
Si le régime sans sucre strict ne vous convient pas, vous pouvez tout de même ajuster votre alimentation. Par exemple, vous pouvez réduire les sucres raffinés plutôt que l’ensemble des glucides.
Privilégiez les sucres naturels comme ceux contenus dans les fruits, car ils apportent en plus des fibres et des vitamines à votre corps. Vous pouvez aussi choisir les glucides complexes à la place des glucides simples : riz brun, légumineuses, pomme de terre, sarrasin, etc. Ils ont l’avantage d’offrir une énergie plus stable en limitant les chutes de glycémie.

Si vous courez régulièrement, une alimentation riche en glucides avant et après vos séances d’entraînement est importante.
Si vous désirez tester le régime cétogène, préférez une période plus calme pour laisser le temps à votre corps de s’adapter.
Le docteur Fabrice Kuhn, auteur du livre « Le régime cétogène pour les sportifs » estime qu’il faut minimum 6 jours sans écart pour que l’organisme commence à produire des cétones.
Même si le régime cétogène est à la mode, il convient finalement à peu de coureurs. Il s’adresse principalement à ceux qui sont prêts à le tenir sérieusement pendant plusieurs semaines, qui font des efforts peu intenses et qui souhaitent tester une nouvelle forme de production d’énergie pendant leurs sorties.
Certains athlètes tels que Zach Bitter, coureur d’ultra marathon, ont adopté ce régime depuis des années avec succès. Cependant, il est loin d’être adapté à tout le monde et nécessite un réel suivi pour ne pas risquer de voir des carences alimentaires s’installer.
Si vous n’êtes pas prêt à vous lancer à 100 % dans un régime sans sucre, privilégiez un régime équilibré, avec un apport de glucides plus importants avant vos séances d’entraînement.
Pendant les efforts longs, il vous sera alors indispensable d’ingérer du glucose (20 à 60 g par heure) pour continuer à produire de l’énergie pendant toute la durée de votre sortie.
Références
Metabolic characteristics of keto-adapted ultra-endurance runners
Jeff S Volek et al. (November 2015)
Metabolism
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/26892521/
Effect of high-fat or high-carbohydrate diets on endurance exercise: a meta-analysis
Matthew Erlenbusch et al. (February 2005)
International Journal of Sport Nutrition and Exercise Metabolism
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/15902985/
High-fat feeding inhibits exercise-induced increase in mitochondrial respiratory flux in skeletal muscle
Mette Skovbro et al. (June 2011)
Journal of Applied Physiology
https://journals.physiology.org/doi/full/10.1152/japplphysiol.01341.2010
La plupart tdes coureurs marathon et ultra de haut niveau consomment au contraire une forte dise de glucides pouvant aller au delà de 100g/h (surtout triathlon). J’ en déduis qu il vaut mieux être coureur amateur pour pratiquer le régime cétogène. Pour ma part, je suis plus ou moins ce régime. Mais cela laisse des traces de fatigue et de lassitude au bout d’un moment. Je ne me vois pas continuer sur le long terme, mais par paliers. En reintroduisant de façon minime des glucides lents (légumes et féculents)